du 05 juin 2024 En devenant appellations communales, Livinière et Boutenac côtoient les cimes en terre languedocienne Deux appellations jouent désormais dans la cour des grands : La Livinière et Boutenac. Détachées de leur appellation socle, Minervois pour la première, Corbières pour la seconde, elles vont désormais tracer leur propre sillon depuis leur reconnaissance officielle par l’Union Européenne. C’est fait ! Après l’homologation par l’État français, l’Union Européenne vient d’enregistrer par décret publié au journal officiel les dénominations AOP La Livinière et AOP Boutenac. L’aboutissement de deux décennies de labeur pour chacune des appellations. Une histoire d’hommes "C’est historique ! approuve David Latham, président de l’appellation Boutenac et vigneron au Château Saint-Estève à Thézan-les-Corbières. À l’origine, Gérard Bertrand, avec Yves Laboucarié du domaine de Fontsaintes, Georges Lemarié de Château Aiguilloux, et mon père à Château Saint-Estève, ont ferraillé dur pour aboutir à une première reconnaissance en 2005 en appellation Corbières Boutenac. Ils ont œuvré pendant plus de 10 ans et, en 2019, la France a reconnu l’appellation Boutenac, mais il restait la phase finale, l’approbation européenne… Mais il y a eu le Covid, et les dossiers ont été freinés pendant la pandémie." La voie tracée vers les grands terroirs français comme Côte Rôtie "C’est une reconnaissance importante pour ce micro terroir qui boucle un cycle de 25 ans de travail collectif et qui ouvre la voie à l’appartenance à la famille des grands terroirs français comme Châteauneuf-du-Pape ou Côte Rôtie", apprécie Gérard Bertrand, qui en fut le premier président. La chapelle Saint-Martin, emblématique du cru Boutenac. Côté Minervois, Maurice Piccini et Roger Piquet ont été les pionniers qui ont su mobiliser autour d’eux et fédérer pour aboutir, en 1999, à la reconnaissance par l’organisme officiel, l’Institut national des appellations d’origine, de l’AOC Minervois La Livinière. L’objectif de ces visionnaires : se hisser à un niveau haut de gamme et valoriser l’unicité d’un terroir. Ces appellations sont entrées sans le cercle très restreint des appellations communales du Languedoc. "La semaine dernière, nous étions au Ritz à Paris, avec La Clape, Terrasses du Larzac et Pic Saint-Loup, et le CIVL avait fait venir 60 professionnels, ce qui nous a permis de mettre en avant le changement de nom", explique David Latham. Le clocher de La Livinière qui signe l’image du cru. Le cru Boutenac, un hommage au carignan "Cette reconnaissance renforce la personnalité de notre cru, désormais plus lisible. C’est l’affirmation concrète de notre identité", détaille encore David Latham. Les vignes, plantées à 180 mètres d’altitude autour du massif du Pinada, côtoient les oliviers, les pins et les arbousiers. Brassées d’arômes de garrigue, elles composent une palette verdoyante dans un paysage vallonné au cœur des Corbières. David Latham, président de l'appellation Boutenac. Le cru Boutenac produit des vins rouges puissants et élégants, marqués par de vieux carignans, mêlés aux grenache, syrah et mourvèdre. "C’est sa force et sa douceur qui le caractérisent, explique le président. Ce sont des vins puissants avec une belle rondeur et un élevage de 15 mois, qui en font des vins de garde." Fruit d’un travail très exigeant, ces vins sont valorisés avec des prix positionnés en haut de gamme, situés dans la fourchette comprise entre 15 et 20 € au caveau. Guy Sabarthès, président de l'appellation La Livinière. La Livinière, l’intensité et le velours d’un vin de garde Ancré sur les contreforts de la Montagne Noire, au sud-ouest du Massif Central, le terroir de la Livinière est implanté en étages, depuis la dalle calcaire du causse de Minerve et ses gorges, jusqu’aux collines boisées et les terrasses caillouteuses. Ce paysage de garrigue est parcouru de murettes de pierres sèches dans lequel se dressent quelques dolmens. Le vignoble s’étend sur un terroir de piémont mêlé de différentes roches, un mélange de cailloux, de sables et d’argiles, de grès, de calcaires et de schistes. Il ne faut pas se tromper de match Le climat méditerranéen, ensoleillé, chaud et sec, est rafraîchi par des courants nocturnes provenant des crêtes du Causse. Les raisins bénéficient de conditions de maturation optimales qui préservent leur acidité. Les vignes sont conduites avec de petits rendements permettant d’élaborer des vins avec une proportion majoritaire de grenache, de mourvèdre et de syrah à 330 mètres d’altitude. Le cahier des charges impose 60 % de syrah et grenache. Un élevage de treize à dix-huit mois donne des vins puissants, intenses et de garde. "Cette reconnaissance est pour nous, vignerons, l’occasion d’officialiser notre statut d’appellation communale, niveau le plus élevé dans la hiérarchie des appellations définies par l’INAO", approuve Guy Sabarthès. L’actuel président de l’AOP La Livinière, successeur d’Isabelle Coustal, a intégré la démarche dès la première heure. "C’est un travail de longue haleine depuis 1995 dans la perspective de devenir un cru. Ça permet de clarifier la situation, d’être une appellation à part entière et de clarifier la hiérarchisation par rapport à l’appellation régionale Languedoc et l’émergence de la dénomination géographique contemporaine. Cette reconnaissance est l’espoir de gagner en notoriété pour nos vins puissants, élégants et épicés." Guy Sabarthès en est persuadé : "Dans le contexte actuel très difficile, il ne faut pas se tromper de match, si l'on s’en sort et si l'on arrive à conserver nos vignobles, ce sera grâce à l’appellation, la reconnaissance de nos origines. C’est l’assurance du maintien de notre activité et du développement de notre territoire". Repères chiffrés La Livinière (Hérault/Aude) représente 350 ha en production, sur un potentiel de 2700 hectares, 9 000 hl de volume de production, 39 caves particulières et 2 caves coopératives sur 6 communes : La Livinière, Siran, Cesseras, Félines-Minervois, Azille et Azillanet. Date de la reconnaissance en AOC Minervois-La Livinière : 1999. Date de la reconnaissance en AOP La Livinière : 2024. Boutenac (Aude) représente 250 ha plantés, sur un potentiel de 2000 ha, 7 500 hl de volume de production. Un cahier des charges impose la mise en avant du carignan dans chaque cuvée, un rendement de 42 hl/ha et 15 mois d’élevage en barriques. 27 caves particulières et 3 caves coopératives (Orfée à Ornaisons, la Cave des demoiselles à Saint-Laurent-de-la-Cabrerisse et Haute Expression à Fabrezan). Montséret ayant fusionné avec Talairan est également concerné en tant que coopérative. L’appellation s'étend sur 10 communes. Date de la reconnaissance en AOC Corbières-Boutenac : 2005. Date de la reconnaissance en AOP Boutenac : 2024. |
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